Page:Goethe - Œuvres, trad. Porchat, tome IV.djvu/367

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Mais ici elle a paru ! Un feu terrible, plutonien, la force tonnante, prodigieuse, de vapeurs éoliennes, a brisé la vieille croûte de la plaine, en sorte qu’une montagne nouvelle a dû naître à l’instant.

THALÈS.

Cela nous avance-t-il davantage ? La montagne est là : à la bonne heure !… Avec de pareils débats, on perd son temps et son loisir, et l’on ne fait que mener le bon peuple par le nez.

ANAXAGORE.

Aussitôt la montagne pullule de Myrmidons, qui se logent dans les crevasses des rochers : ce sont Pygmées, fourmis, marmousets et autres petits êtres agissants. (A Homunculus.) Tu n’as jamais aspiré aux grandeurs ; lu as vécu confiné dans la solitude : si tu peux t’habituer au commandement, je te fais couronner roi.

HOMUNCULUS.

Que dit à cela mon Thalès ?

THALÈS.

Je ne saurais te le conseiller : avec les petits, on fait de petites choses ; avec les grands, le petit devient grand. Regarde là haut cette noire nuée de grues : elle menace le peuple révolté, et menacerait également le roi. Avec leurs becs aigus, leurs pieds armés de griffes, elles fondent sur les petits. Déjà l’orage fatal les menace. Des mains criminelles ont égorgé les hérons autour du marais paisible et tranquille, mais cette pluie de flèches meurtrières provoque une vengeance cruelle et sanglante, excite chez les parents la fureur de répandre le sang des coupables Pygmées. Que servent maintenant le bouclier et le casque et la lance ? Que sert à ce peuple de nains l’aigrette de héron ? Comme les Dactyles et les fourmis se cachent ! Déjà l’armée s’ébranle, elle fuit, elle se disperse.

Anaxagore, solennellement, après une pause.

Si j’ai pu jusqu’à présent honorer les puissances souterraines, je me tourne cette fois vers celles d’en haut…. O toi, qui brilles aux cieux dans une éternelle jeunesse, déesse aux trois formes, aux trois noms, je t’invoque, dans la détresse de mon peuple, Diane, Lune, Hécate ! toi qui dilates le cœur, toi qui es plongée