Page:Goethe - Œuvres, trad. Porchat, tome IV.djvu/85

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pays vers la droite : c’est par là que je pris mon chemin. La contrée semblait tout à fait nettoyée d’ennemis et de brigands. Quelques serviteurs seulement escortaient le char, et une femme était à mes côtés. A l’entrée de la montagne, s’élève un rocher ; un vieux chêne l’entoure de ses fortes branches, et de son flanc coule une source claire. Là les serviteurs s’arrêtèrent à l’ombre ; ils abreuvèrent, suivant l’usage, les chevaux dételés ; et se dispersèrent. L’un cherchait, pour nous restaurer, le miel qui distille dans la forêt ; l’autre gardait les chevaux près de la source ; le troisième agitait un frais éventail de rameaux. Tout à coup ils entendent le plus éloigné pousser des cris ; le plus proche accourt, et une lutte s’engage entre mes serviteurs sans armes et des hommes hardis et bien armés, qui s’élancent de la forêt. Mes fidèles tombent en se défendant avec vigueur ; le cocher lui-même qui, saisi d’horreur, laisse échapper les chevaux et oppose, à coups de pierres, une résistance opiniâtre à la violence. Nous fuyons, puis nous faisons halte. Les brigands croient s’emparer sans peine de mon enfant, mais le combat se renouvelle. Nous luttons avec fureur, défendant ce trésor. J’entoure mon fils avec les indissolubles liens des bras maternels. Ma compagne, poussant des cris affreux, arrête, avec ses mains rapides, les efforts de la violence. Enfin, atteinte d’un coup d’épée, avec dessein ou par hasard, je ne sais, je tombe sans connaissance ; je laisse, avec le sentiment, échapper l’enfant de mon sein, et ma compagne tombe grièvement blessée.

ElpÉnor.

Oh ! pourquoi est-on un enfant ! Pourquoi est-on éloigné, au moment où un pareil secours est nécessaire ! Mes poings se serrent à ce récit. J’entends les femmes s’écrier : « Secours ! vengeance ! * N’est-il pas vrai, ma mère, celui que les dieux aiment, ils le conduisent à la place où l’on a besoin de lui ?

Antiope.

C’est ainsi qu’ils conduisirent Hercule et Thésée, Jason et l’élite des anciens héros. Le danger cherche le noble cœur, qui le cherche à son tour : ils doivent donc se rencontrer. Hélas ! et le danger surprend aussi les faibles, auxquels il ne reste rien que les cris du désespoir. C’est ainsi que nous trouvèrent les bergers de la montagne ; ils bandèrent mes plaies ; leurs soigneuses