Page:Goethe - Œuvres, trad. Porchat, tome IV.djvu/92

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SCÈNE VI.

ANTIOPE, ELPÉNOR.

ANTIOPE.

Laisse-moi te remercier encore une fois, avec un sentiment de joie et d’allégresse.

ELPÉNOR.

Et pourquoi ? .

ANTIOPE.

Parce que tu m’as délivrée du fardeau qui pesait sur ma vie.

ELPÉNOR.

Moi ?

ANTIOPE.

La haine est un pesant fardeau : il refoule le cœur au fond de la poitrine, et, comme une pierre sépulcrale, il pèse durement sur toutes les joies. Ce n’est pas seulement dans la détresse que le pur, l’agréable rayon du joyeux amour est l’unique consolation : lorsqu’il s’enveloppe de nuages, hélas ! la robe flottante du bonheur, de la joie, ne brille pas de réjouissantes couleurs. Comme dans les mains des dieux, j’ai déposé dans les tiennes ma douleur, et je me relève tranquille, ainsi que delà prière. Je me suis lavée du contact impur des furies vengeresses ; l’onde, qui purifie tout, emporte bien loin cette souillure ; un germe secret de paisible espérance s’élève, comme à travers la terre ameublie, et regarde timidement la lumière, qui le colore de verdure.

ELPÉNOR.

Donne-moi ta confiance ! Il ne faut rien me cacher.

ANTIOPE.

Est-il encore parmi les vivants celui que je pleure depuis longtemps, comme descendu chez les morts ?

ElpÉnor. 

Trois fois bienvenu, s’il paraissait à nos yeux !

ANTIOPE.

Parle ; sois sincère ! Peux-tu promettre, s’il vit, s’il revient et se montre à nos yeux, que tu lui rendras de bon cœur la moitié qui lui appartient ?

ELPÉNOR.