Page:Goethe - Œuvres, trad. Porchat, tome X.djvu/211

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

grands murs menaçaient ruine ; les tours étaient mal sûres. Mais que servent les descriptions détaillées, puisque nous avons nommé les uns après les autres les grands édifices que les flammes avaient dévorés ?

Une ancienne prédilection me fit courir au doyenné, dont j’avais conservé le souvenir comme d’une petite merveille d’architecture. Le porche à colonnes était encore debout avec ses pignons, mais je ne marchai que trop tôt sur les ruines des belles voûtes écroulées ; je vis à mes pieds les grilles, dont les mailles protégeaient naguère les fenêtres hautes ; on voyait encore çà et là un reste de la richesse et de l’élégance disparues. Cette résidence admirable était donc aussi pour jamais anéantie ! Tous les édifices qui entouraient la place avaient eu le même sort. C’était dans la nuit du 27 juin que la destruction de ces magnificences avait illuminé la contrée.

Ensuite je me transportai dans le quartier du château, dont personne n’osait approcher. Des baraques de planches, qu’on y avait adossées, annonçaient la profanation de cette demeure princière ; sur la place on voyait pêle-mêle des canons mis hors de service, les uns par le tir de l’ennemi, les autres pour avoir été soumis à de trop grands efforts.

Tout comme l’ennemi extérieur avait détruit avec leur contenu des bâtiments superbes, à l’intérieur, la barbarie, l’insolence et le capriee avaient fait aussi beaucoup de ruines. Le palais Ostheim subsistait encore, mais il étaif devenu l’auberge des tailleurs, un logement militaire, un corps de garde. Affreux spectaclel Les salles étaient pleines de haillons, de lambeaux: les murs, où le gypse imitait le marbre, étaient brisés, percés de crochets et de clous auxquels on avait suspendu des armes.

Le bâtiment de l’Académie avait encore une belle apparence : seulement, au deuxième étage, un boulet avait brisé un tableau de fenêtre du logement de Sœmmering. J’y retrouvai cet ami, je ne dirai pas établi, car ses belles chambres avaient été affreusement maltraitées par leurs hôtes sauvages. Heureusement on n’avait pas ouvert son laboratoire, et il retrouvait toutes ses préparations saines et sauves. Nous les visitâmes, et elles furent pour nous le sujet d’une conversation instructive.

Dans nos promenades, nous trouvâmes une vieille femme à