Page:Goethe - Œuvres, trad. Porchat, tome X.djvu/274

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Hermann et Dorothée avait paru en petit format, et déjà l’idée d’une nouvelle épopée-roman était conçue. Le plan était tout, tracé : malheureusement je n’en fis pas mystère à mes amis. Ils me détournèrent de l’entreprise, et je regrette encore d’avoir suivi leur conseil : le poète lui seul peut savoir ce qu’il y a dans un sujet, et tout l’agrément et le charme que son art y pourra répandre. J’écrivis en vers élégiaques le Nouveau Pausias et la Métamorphose des plantes ; Schiller, de son côté, riposta par le Plongeur. A vrai dire, nous n’avions de repos ni jour ni nuit ; le sommeil ne visitait Schiller que vers le matin. Des passions de tout genre étaient en mouvement ; nos Amies avaient remué toute l’Allemagne ; chacun blâmait et riait en même temps. Les blessés cherchaient à nous rendre la pareille : toute notre réplique était de persévérer dans une activité infatigable.

Je continuai de traduire Cellini pour Schiller ; et, comme j’étais revenu aux études bibliques pour y chercher des sujets de poésie, je me laissai entraîner à traiter d’une manière critique la marche des enfants d’Israël dans le désert. Ce traité, accompagné d’une carte, devait faire de cette singulière promenade de quarante années une entreprise, sinon raisonnable, du moins intelligible.

Un amour irrésistible de la campagne et des jardins s’était emparé de tout le monde. Schiller acheta un jardin près d’Iéna et s’y retira ; Wieland s’établit à Ossmanstaedt. A une lieue de là, sur la rive droite de l’Ilm, un petit bien était à vendre à Oberrossla ; j’avais des vues sur ce domaine.

Nous eûmes la bonne visite de Lerse et de Hirt. Lord Bristol, le singulier voyageur, me dispose à faire une expérience aventureuse. Je me prépare à retourner en Suisse au-devant de mon ami Henri Meyer, qui revenait d’Italie. Avant mon départ, je brûle toutes les lettres que j’ai reçues depuis 1772, par mon éloignement décidé pour la publication des épanchements de l’amitié. Schiller vient encore me voir à Weimar et je pars le 30 juillet. Je vis à Francfort Sœmmering, à Stuttgart Scheffauer, Dannecker et le professeur Thouret.

Au commencement de septembre, je composai le Jeune garçon et le ruisseau du moulin que Zumsteeg mit aussitôt en musique,