Page:Goethe - Œuvres, trad. Porchat, tome X.djvu/315

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

quable, sa conduite bizarre, enfin le mystère qui planaitsurtout cela, avaient depuis longtemps év-eillé ma curiosité et celle de mes amis. Sachant qu’il, était alors chez lui, nous résolûmes d’aller faire une visite à cet homme qui, tel qu’un mystérieux griffon, tenait sous sa garde des trésors extraordinaires, à peine imaginables. Mon joyeux compagnon de voyage permit que mon fils Auguste, alors âgé de quinze ans, .fût de la partie, qui n’en fut que plus gaie. 1x3 savant professeur se faisait une occupation de le houspiller sans cesse, et Auguste usait librement du droit de défense ; des agaceries en paroles on passait quelquefois aux jeux de mains, dont il fallait rire, bien qu’ils soient un peu incommodes en voiture.

A Magdebourg, je m’occupaj surtout des antiquités de la cathédrale, et j’en observai les monuments plastiques, surtout les tombeaux. J’en citerai seulement trois en bronze, qui furent érigés pour trois archevêques, Adelbert II (1403), roide et dur, mais d’une exécution soignée et naturelle ; Frédéric (1464), d’un meilleur style ; Ernest (1499), œuvre inestimable de Pierre Vischer. Je ne pouvais me lasser del’admirer, car, une fois que l’œil et le goût sont exercés à sentir le progrès des arts, leur déclin, leurs écarts, leur retour dans la bonne voie, il n’est pas de conversation plus instructive et plus intéressante que le silence de monuments tels que ceux-là.

Nous observâmes avec attention et intérêt la ville, la forteresse et, du haut des remparts, la contrée environnante ; mon regard s’arrêta longtemps sur le groupe d’arbres, peu éloignés, qui formait à la plaine une décoration majestueuse. Il ombrageait le cloître de Bergen, lieu qui rappelait plus d’un souvenir. C’est là que "VYieland avait promené les tendres rêveries de sa jeunesse et jeté, les bases d’une culture littéraire plus élevée ; c’est là que l’abbé Steinmetz avait exercé l’influence d’une piété, exclusive peut-être, mais énergique et sincère. Et le monde, dans son e.sprit impie d’exclusion, a grand besoin de ces sources de chaleur et de lumière, pour ne pas se glacer et se dessécher tout à fait dans un égarement égoïste.

.Dans nos visites répétées à la cathédrale, nous remarquâmes un Français, un ecclésiastique, aux allures vives, qui, promené par le sacristain, parlait très-haut avec sa société. Nous apprî-