Page:Goethe - Œuvres, trad. Porchat, tome X.djvu/359

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée


Le projet d’Uwaroff de fonder une académie asiatique m’attira dans ces régions, où j’étais d’ailleurs enclin à faire un plus long pèlerinage. Les nouvelles Poésies alémaniques de Hébel me firent l’agréable impression que nous sentons toujours à l’approche de nos ancêtres. Il n’en fut pas ainsi du Livre des héros de Hagen : une époque qui changeait tout s’était interposée. Le Pauvre Henri de Busching, poème en soi très-estimable, me causa une souffrance physique et morale. Un maître lépreux, pour qui une courageuse jeune fille se sacrifie, ne peut guère inspirer que le dégoût. L’alTreuse maladie qui sert ici de base à l’héroïsme me produisit du moins une impression si violente, qu’au seul contact du livre, il me semblait déjà que je fusse atteint de la lèpre.

Un hasard fit tomber ensuite dans mes mains un livre dont on aurait pu craindre une contagion immorale ; cependant, comme une vanité téméraire nous persuade que nous échapperons toujours plus facilement aux influences-spirituelles qu’aux corporelles, je lus le petit volume avec plaisir, mais rapidement, parce qu’on ne pouvait me le prêter longtemps : c’étaient les Novelle galanti de Berrochio. Elles approchent de celles de l’abbé Casti pour la poésie et le style, mais Casti groupe ses idées avec plus d’art et domine mieux son sujet. Par le conseil d’un ami, je lus aussitôt après les Novelle del Bandello, puis je passai à un livre de la même famille : YHistoire de Manon Lescaut et du chevalier Desgrieux. Je dois me rendre le témoignage qu’après tout cela, je revins avec une satisfaction innocente au Vicaire de Wakefield.

1812.

Nous redonnons au théâtre Roméo et Juliette ; nous préparons La vie est un songe, de Caldéron. Ces poèmes exigent et provoquent des études plus profondes. Théodore Kœrner s’était produit comme auteur dramatique". Toni Zriny, Rosamonde, qui reflètent un passé récent encore, sont aisément saisis et rendus par les comédiens, et Bien accueillis du public, qui y retrouve ses sentiments.

Wolf et Riemer veulent reprendre Faust pour le théâtre, ce qui entraîne le poète à intercaler quelques nouvelles scènes,