Page:Goethe - Œuvres, trad. Porchat, tome X.djvu/364

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Parmi les événements publics, je note seulement la prise de Paris. J’assiste à Francfort à la première célébration du 18 octobre.

1815.

Dès l’année précédente, j’avais connu l’ensemble des poésies de Hafiz par la traduction de Hammer, et, si les pièces éparses de cet excellent poète, que j’avais trouvées çà et là traduites dans les journaux, étaient restées sans effet sur moi, elles agirent d’autant plus vivement toutes ensemble, et je fus entraîné à exercer de mon côté mon talent poétique, afin de soutenir celte apparition sublime. L’influence était trop vive, la traduction était sous mes yeux ; d’ailleurs je sentais le besoin de fuir loin du monde réel, qui menaçait de se dévorer lui-même, et de me réfugier dans un monde idéal, auquel ma fantaisie, mes facultés, mon goût, pouvaient prendre une joyeuse part.

Je n’étais pas tout à fait étranger aux mœurs de l’Orient, et je m’occupai de la langue, autant que la chose était indispensable pour respirer cette atmosphère ; je m’appliquai même à l’écriture avec ses particularités et ses ornements. Je repris les Moallakatsl,dont j’avais traduit quelques-uns aussitôt après leur apparition. Je me représentai la vie des Bédouins. Le Mahomet d’OElsner, avec lequel je m’étais familiarisé depuis longtemps, me rendit de nouveaux services ; mes relations avec de Dietz s’affermirent. Le livre du Cabus * m’ouvrit le théâtre de cette civilisation à une époque très-remarquable et semblable à la nôtre, où un prince avait tout sujet d’enseigner à son fils, dans un long ouvrage, comment il pourrait, au besoin, en cas de revers funeste, gagner son pain en exerçant un métier. Medschnoun et Leila, modèles d’un amour sans bornes, devaient à leur tour satisfaire le sentiment et l’imagination. La pure religion des Parsis fut relevée de son ancienne décadence et ramenée à sa belle simplicité ; je relus avec intention les voyageurs Pietro delia Vella, Tavernier, Chardin, que j’avais étudiés autrefois.

Ainsi les matériaux s’entassèrent, le fonds s’enrichit, si bien


1. Tome I, page Cl G. — 2. Tome I, page 729.