Page:Goethe - Œuvres, trad. Porchat, tome X.djvu/499

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le souvenir de ces temps, auxquels il s’intéressait, nous en donnera-t-il une idée. On verrait clairement, une fois de plus, que l’Allemand ne saurait faire une chose plus bizarre que de se renfermer dans son enceinte méditerranée, se figurant qu’il se nourrit de son propre bien, sans songer à tout ce qu’il a reçu depuis un demi-siècle des peuples étrangers et à ce qu’il leur emprunte encore tous les jours.

Mais, sur tout cela, le mieux aujourd’hui est de se taire : le temps viendra où l’Allemand demandera encore par quelle voie ses ancêtres ont réussi à élever sa langue à ce haut degré d’indépendance dont elle se glorifie aujourd’hui.

Nous accordons volontiers que tout Allemand peut se développer complétement dans les limites de notre langue, sans aucun secours étranger. Nous devons cet avantage aux travaux particuliers et divers du siècle passé, travaux qui profitent maintenant à toute la nation, mais surtout à une certaine classe moyenne, à prendre ce mot dans son acception la plus favorable. A cette classe appartiennent les habitants des petites villes, dont l’Allemagne compte un si grand nombre de bien situées et bien établies ; tous les employés et les sous-employés qui s’y trouvent, les commerçants, les fabricants, particulièrement les femmes et les filles de ces familles, les ecclésiastiques campagnards, en tant qu’ils sont instituteurs : toutes ces personnes, qui se trouvent dans une situation bornée, mais pourtant aisée et qui procure un bien-être moral, peuvent subvenir à leur besoin de société et d’instruction avec les seules ressources de la langue maternelle.

Mais, si l’on a quelque expérience du monde, on ne peut ignorer que, dans les sphères plus étendues et plus élevées, on exige aussi de nous la connaissance pratique d’autres langues.

Épurer et enrichir en même temps la langue maternelle est l’affaire des meilleurs esprits. L’épurer sans l’enrichir est sou-