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24 juillet.

Puisque tu tiens tant à ce que je ne néglige pas le dessin, je ferais peut-être mieux de me taire sur ce point que de t’avouer que depuis longtemps je m’en suis bien peu occupé.

Jamais je ne fus plus heureux, jamais ma sensibilité pour la nature, jusqu’au caillou, jusqu’au brin d’herbe, ne fut plus pleine et plus vive ; et cependant…. je ne sais comment m’exprimer…. mon imagination est devenue si faible, tout nage et vacille tellement devant mon âme, que je ne puis saisir un contour ; mais je me figure que, si j’avais de l’argile ou de la cire, je réussirais mieux. Si cela dure, je prendrai de l’argile et je la pétrirai, dussé-je ne faire que des boulettes.

J’ai commencé déjà trois fois le portrait de Charlotte, et trois fois je me suis fait honte ; cela me chagrine d’autant plus qu’il y a peu de temps je réussissais fort bien à saisir la ressemblance. Je me suis donc borné à prendre sa silhouette, et il faudra bien que je m’en contente.