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10 LE REVIZOR

Je ne cache à personne que je prends des pots-de- vin?... Mais en quoi consistent- ils? En lévriers!... C'est une autre affaire !...

Le préfet. — Lévriers ou autres choses... ce sont toujours des pots-de-vin...

Ammoss Phiodorovitch. — Ça non, Antone Anto- novitch. Supposons, par exemple, que le manteau de fourrure d'un solliciteur coûte cinq cents roubles... et que votre femme ait besoin d'un châle...

Le préfet. — Peu m'importe que vos pots-de- vin soient des lévriers !... En revanche, vous ne croyez pas en Dieu... vous n'allez jamais à l'église... tandis que moi... je m'y rends tous les dimanches... je suis ferme dans mes croyances... Ah ! quand vous com- mencez à parler de la création du monde, mes cheveux se dressent sur la tête...

Ammoss Phiodorovitch. — Oui, mais c'est grâce à mon intelligence que mes convictions se sont for- gées...

Le préfet. — Il y a des cas où le manque de raison est préférable à l'excès... D'ailleurs, c'est incidem- ment que j'ai parlé du tribunal... et je doute fort que jamais on y fourre son nez... Dieu lui-même protège cet endroit si réputé... Vous, Louka Loukitch, qui êtes inspecteur scolaire, vous devriez vous occuper de vos instituteurs. Ils sont évidemment très instruits, après avoir été élevés dans des collèges... mais j'avoue que leur tenue laisse à désirer... certes leur métier y est pour quelque chose... L'un d'eux, par exemple, le gros joufflu... impossible de me rappeler son nom...

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