Page:Gogol - Nouvelles choisies Hachette - Viardot, 1853.djvu/128

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Notre philosophe avait le plus grand désir de savoir qui était ce centenier, quel caractère il avait, et ce qu’était sa fille, revenue à la maison d’une manière si étrange, maintenant à l’article de la mort, et dont l’histoire se trouvait tout à coup mêlée à la sienne propre, enfin ce qui se passait dans leur maison. Mais toutes ces questions, il les faisait en vain ; les Cosaques étaient probablement des philosophes comme lui, car ils ne disaient mot et fumaient leurs pipes. Cependant l’un d’eux, s’adressant au cocher :

— Prends garde, Overko, vieux fainéant que tu es, lui dit-il ; quand tu approcheras du cabaret qui se trouve sur la route de Tchoukhraïloff, n’oublie pas de t’arrêter et de réveiller moi et les autres, si nous étions endormis. —

Cela dit, il se mit à ronfler. Mais sa recommandation était complétement inutile, car à peine la gigantesque kibitka fut-elle en vue du cabaret de la route, que tous s’écrièrent à la fois :

— Arrête ! —

D’ailleurs, les chevaux d’Overko avaient l’habitude de s’arrêter d’eux-mêmes devant chaque bouchon.

Malgré la chaleur accablante d’une journée de juillet, ils sortirent tous de la kibitka et entrèrent dans une sale échoppe. Le juif cabaretier s’élança au-devant d’eux avec des démonstrations de joie,