Page:Gogol - Nouvelles de Pétersbourg (extraits Le Portrait ; Le Nez), 1998.djvu/55

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portraits. Chacun d’eux se dédoublait, se quadruplait à ses yeux, tous les murs se tapissaient de ces portraits qui le fixaient de leurs yeux immobiles et vivants ; du plafond au plancher ce n’étaient que regards effrayants, et, pour en contenir davantage, la pièce s’élargissait, se prolongeait à l’infini. Le médecin qui avait entrepris de le soigner et connaissait vaguement son étrange histoire, cherchait en vain quel lien secret ces hallucinations pouvaient avoir avec la vie de son malade. Mais le malheureux avait déjà perdu tout sentiment hormis celui de ses tortures et n’entrecoupait que de paroles décousues ses abominables lamentations. Enfin, dans un dernier accès, muet celui-là, sa vie se brisa, et il n’offrit plus qu’un cadavre épouvantable à voir. On ne découvrit rien de ses immenses richesses ; mais, quand on aperçut en lambeaux tant de superbes œuvres d’art dont la valeur dépassait plusieurs millions, on comprit quel monstrueux emploi il en avait fait.