Page:Gogol - Tarass Boulba, Hachette, 1882.djvu/219

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Lorsque tous les prêtres sortirent, vêtus de leurs brillantes robes dorées, portant les images de la croix, et, à leur tête, l’archevêque lui-même, la crosse en main et la mitre en tête, tous les Cosaques plièrent le genou et ôtèrent leurs bonnets. En ce moment ils n’eussent respecté personne, pas même le roi ; mais ils n’osèrent point agir contre leur Église chrétienne, et s’humilièrent devant leur clergé. L’hetman et les polkovniks consentirent d’un commun accord à laisser partir Potocki, après lui avoir fait jurer de laisser désormais en paix toutes les églises chrétiennes, d’oublier les inimitiés passées et de ne faire aucun mal à l’armée cosaque. Un seul polkovnik refusa de consentir à une paix pareille ; c’était Tarass Boulba. Il arracha une mèche de ses cheveux, et s’écria

Hetman, hetman ! et vous, polkovniks, ne faites pas cette action de vieille femme ; ne vous fiez pas aux Polonais ; ils vous trahiront, les chiens !

Et lorsque le greffier du polk eut présenté le traité de paix, lorsque l’hetman y eut apposé sa main toute-puissante, Boulba détacha son précieux sabre turc, en pur damas du plus bel acier, le brisa en deux, comme un roseau, et en jeta au loin les tronçons dans deux directions opposées.

— Adieu donc ! s’écria-t-il. De même que les deux moitiés de ce sabre ne se réuniront plus et ne formeront jamais une même arme, de même, nous, aussi,