Page:Goncourt - Germinie Lacerteux, 1889.djvu/194

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son lit, n’est-ce pas que vous me donnerez bien une fois quinze jours pour aller chez nous ?… Ça me revient maintenant…


XLII.


Bientôt mademoiselle s’étonna d’un entier changement dans la manière d’être, les habitudes de sa bonne. Germinie n’eut plus ses maussaderies, ses humeurs farouches, ses rébellions, ces mâchonnements de mots où grognait son mécontentement. Elle sortit tout à coup de sa paresse, reprit le zèle de son ouvrage. Elle ne resta plus des heures à faire son marché ; elle semblait fuir la rue. Le soir, elle ne sortait plus ; à peine si elle bougeait d’auprès de mademoiselle, l’entourant, la gardant de son lever à son coucher, prenant d’elle un soin continu, incessant, presque irritant, ne la laissant pas se lever, pas même allonger la main pour prendre quelque chose, la servant, la veillant comme un enfant. Par moments, fatiguée d’elle, lasse de cette éternelle occupation de sa personne, mademoiselle ouvrait la bouche pour lui dire : Ah çà ! vas-tu bientôt décampiller d’ici ? Mais Germinie levait sur elle son sourire, un sourire si triste et si doux, qu’il arrêtait l’impatience sur les lèvres de la vieille fille. Et elle continuait à demeurer près d’elle, avec une