Page:Goncourt - Germinie Lacerteux, 1889.djvu/255

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la Poule, qui habitait, avec une nichée d’enfants, une jolie petite propriété dans un village de la Brie, et qui, depuis de longues années, sollicitait d’elle une longue visite. Elle lui demanda l’hospitalité pendant un mois, six semaines pour elle et sa bonne malade.

On partit. Germinie était heureuse. Arrivée, elle se trouva mieux. Sa maladie, pendant quelques jours, eut l’air de se laisser distraire par le changement. Mais l’été, cette année-là, était incertain, pluvieux, tourmenté de soudaines variations et de souffles brusques. Germinie prit un refroidissement ; et mademoiselle entendit bientôt recommencer sur sa tête, juste au-dessus de l’endroit où elle couchait, l’affreuse toux qui lui avait été si insupportable et si douloureuse à Paris. C’étaient des quintes pressées et comme étranglées qui s’arrêtaient un moment, puis reprenaient, des quintes dont les silences laissaient à l’oreille et au cœur une attente nerveuse, anxieuse de ce qui allait revenir et de ce qui revenait toujours, éclatait, se brisait, s’éteignait encore, mais vibrait, même éteint, sans jamais se taire ni vouloir finir.

Pourtant, de ces horribles nuits, Germinie se relevait avec une énergie, une activité qui étonnait et, par moment, rassurait mademoiselle. Elle était debout avec tout le monde. Un matin, à cinq heures, elle alla avec le domestique dans un char-à-banc, à trois lieues de là, chercher du poisson dans un moulin ; une autre fois, elle se traîna, avec les