Page:Goncourt - Germinie Lacerteux, 1889.djvu/285

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— Ah ! par exemple, mademoiselle… les toits, regardez donc… ils sont tout blancs.

— Eh bien, il neige, voilà tout.

Dix minutes après, Mlle de Varandeuil disait au cocher de fiacre qu’elle avait envoyé chercher :

— Cimetière Montmartre !


LXX.


Au loin, un mur s’allongeait, un mur de fermeture, tout droit, continuant toujours. Le filet de neige qui lignait son chaperon lui donnait une couleur de rouille sale. Dans son angle, à gauche, trois arbres dépouillés dressaient sur le ciel leurs sèches branches noires. Ils bruissaient tristement avec un son de bois mort entre-choqué par la bise. Au-dessus de ces arbres, derrière le mur et tout contre, se dressaient les deux bras où pendait un des derniers réverbères à l’huile de Paris. Quelques toits tout blancs s’espaçaient çà et là ; puis se levait la montée de la butte Montmartre dont le linceul de neige était déchiré par des coulées de terre et des taches sablonneuses. De petits murs gris suivaient l’escarpement, surmontés de maigres arbres décharnés dont les bouquets se violaçaient dans la brume, jusqu’à deux moulins noirs. Le ciel était plombé, lavé des tons bleuâtres et froids de l’encre