Page:Goncourt - Journal, t3, 1888.djvu/198

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toutes les autres vertus sociales, et l’avarice le manque de ces mêmes vertus.

2 février. — Il y a des gens qui voient partout la Providence dans la vie : nous, nous sommes bien forcés d’y voir le contraire. Quand les grands ennuis font un moment trêve dans notre existence, il semble qu’un hasard méchant, et d’une imagination diabolique, met son ingéniosité à nous tourmenter par des persécutions insupportables, ironiques et bêtes. Notre appartement est le seul de la maison où il y ait des objets d’art ; et c’est aussi le seul où il pleuve, quand il pleut. Nous venons de nous agrandir d’un petit logement, et nous croyions avoir admirablement arrangé notre chez nous : voilà un homme d’écurie qui pendant six heures, tous les jours, en criant, en beuglant, en sifflant, nous rend impossible le sommeil du matin et le travail dans la journée. Ce bruit nous met dans un état nerveux abominable.

— Je crois que beaucoup d’hémiplégies viennent de la disproportion de l’homme avec sa place : les trop grandes positions font sauter les petites cervelles.

— Un paysan, un ancien châtreur de cochons, tombe chez nous, pour nous acheter nos fermes