Page:Goncourt - Journal, t3, 1888.djvu/226

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Un des bonheurs de notre vie, cette dépêche ! Nous voilà, je crois, propriétaires d’une maison que nous avons vue par hasard, ces jours-ci, au Parc des Princes, une maison bizarre, presque cocasse, ressemblant à une petite maison d’un sultan de Crébillon fils, mais qui nous a charmés, ensorcelés par son originale étrangeté ! Elle nous plaît sans doute parce qu’elle n’est pas la maison bourgeoise de tout le monde. Avec cela un beau jardin, de vrais arbres.

Et nous voilà, tout le jour, dans un contentement anxieux et dans une fièvre de rêves d’embellissements, suspendus sur cette pensée de maison, sur ce grand changement de notre existence, et où nous espérons trouver plus de paix pour nos nerfs, plus de respect des milieux pour notre travail.

Vendredi 26 juin. — Vraiment, c’est à se croire poursuivis par la fatalité. Une lettre de Mme de Tourbet, que nous ouvrons ce matin, nous apprend que, pendant que la propriétaire nous vendait sa maison, elle était vendue par Girardin et Baroche à une autre personne. Et voilà une semaine, que nous possédions en idée cette maison, que nous l’habitions en imagination, que nous l’arrangions, et que sur le sable du jardin des Célestins nous tracions le plan d’un atelier que nous voulions bâtir dans le jardin. Cette maison vraiment nous tenait au cœur, nous en étions devenus amoureux, pris par le grand je ne