Page:Goncourt - Journal, t3, 1888.djvu/233

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— L’artiste peut prendre la nature au posé, l’écrivain est obligé de la saisir au vol et comme un voleur.

4 août. — Nous sommes là, sur le perron de cette maison désirée d’Auteuil. Il fait encore du soleil, et le gazon et les feuilles des arbustes brillent sous la pluie d’un tuyau d’arrosage.

Quatre-vingt-deux mille cinq cents francs ? dit mon frère, et le cœur nous bat à tous les deux.

— Je vous écrirai demain, fait le propriétaire, et c’est probable que j’accepterai.

— Quatre-vingt-trois mille francs et votre réponse à l’instant ?

Le propriétaire a réfléchi cinq éternelles minutes, puis il a laissé tomber mélancoliquement : « C’est fait. »

Nous sommes sortis, nous étions comme ivres.

Ce soir chez la princesse, ce drôle de corps du général Fleury, favori bizarre et original, tout en ironie, en persiflage, à la moquerie flûtée, légère, effleurante, tombant du demi-sourire de ses grosses moustaches, sur toute la cour, sur lui-même, sur les autres, sur son service, sur son maître, sur sa maîtresse, — au fond ayant l’air d’un homme dans une bonne stalle, regardant, sceptiquement jouer une comédie, un bout de sifflet entre les dents.

7 août. — La princesse a adressé hier une semonce