Page:Goncourt - Journal, t3, 1888.djvu/274

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sorti du savant, frappé du style et de l’osé de notre plume, — car il aurait eu, devant le papier, les timidités baveuses et les corrections un peu intimidées, qu’il nous a envoyées, en marge de nos épreuves.

Bizarres racines ! Fécondation singulière de ce livre. Souvenir de fange d’où l’on peut faire sortir du sublime ! On ne devinerait pas que le mot de la fin vient d’une horrible histoire, qui nous était restée dans l’oreille de l’esprit, d’un refrain ordurier d’une petite rouleuse, qui rentrant au matin, après avoir fait la retape toute la nuit, criait, à travers la porte, à sa mère qui ne lui ouvrait pas : « M’man, m’man, ouvre-moi ! » et à la fin, impatientée, jetait : « Ah ! que c’est m… ! » C’est ce qu’on peut appeler une perle ramassée dans du fumier.

7 février. — Ironie des choses et du gâchis de ce temps, où tout semble à contresens. Il arrive que nous, qui avons à nous plaindre, plus que personne, de ce régime (procès en police correctionnelle nous avons été assis entre les gendarmes, procès à propos de notre nom, que l’Empereur autorisait un monsieur, qui n’était pas de notre famille, à porter, etc.), nous, qui avons toutes les haines de purs lettrés pour ce gouvernement, ennemi et envieux des lettres, et nous qui n’avons, dans cette pétaudière d’un Empire ramolli, d’autre amitié que l’amitié de la princesse, et encore une amitié en dispute et en lutte sur toute idée et toute chose, c’est nous, dont on