Page:Goncourt - Journal, t3, 1888.djvu/72

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23 août. — Je rencontre ici un étudiant en droit, le type de la jeunesse libérale, républicaine, sérieuse, vieillotte, avec des appétits âpres d’avenir, et la conviction intime de tout conquérir. Il me confirme dans l’idée que la jeunesse actuelle se partage en deux mondes tout différents, sans aucune fusion ni rapprochement possible : la pure gandinerie, d’une viduité de tête sans exemple, et le camp des travailleurs, plus enragés au travail qu’à n’importe quelle époque : une génération retranchée du monde, aigrie par la solitude, une génération amère, presque menaçante.

— Voici un type de bonté féminine sur lequel il n’y a pas à se tromper : le teint un peu tiqueté de taches de rousseur, les lèvres épaisses, et la bouche comprimée et entr’ouverte comme un gros bouton de fleur, vulgo en cul de poule.

— Dans une partie de campagne où tout le monde est couché sur l’herbe, il y a comme une volupté qui s’étire et se pâme, dans ces bouts de doigts de femme, farfouillant près de la fine cheville, dans une bottine grise. On dirait la plante du pied de l’Amour chatouillée par le Midi.

28 août. — À l’enterrement de Roger de Beauvoir,