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sur une planche, au plafond, une fiole remplie d’eau-de-vie de piéton, des assiettes de ferme, une lanterne, et un morceau de savon de Marseille pendu à une ficelle.

Un antre, une tanière, où il fait bon de s’ensauvager toute une journée.

25 novembre. — Je me lève, j’ouvre la France… Gavarni mort… un coup de foudre… L’enterrement à l’heure où je lis cela… Et nous n’y serons pas, nous ne nous retrouverons pas derrière le cercueil de l’homme que nous avons le plus aimé, le plus admiré… Nous ne le reverrons plus…

Toutes sortes d’idées, de souvenirs : la mélancolie de ses derniers jours, ses mains si maigres qu’on aurait dû mouler, la caresse de son œil, sa voix si tendre quand il nous appelait ses petits, ce quelque chose en lui d’un père pour nous.

Et je pense à cette première atteinte de la mort qui l’a touché à mon bras — ô ironie ! — au sortir d’un bal de l’Opéra qu’il avait voulu revoir pour la dernière fois.

Je regrette tout ce que je n’ai pas sauvé de lui par une note… Oh ! comme la mort vous fait voir que la vie est de l’histoire !

2 décembre. — Tout un mois passé au vent, à l’air, à la pluie, à la gelée, les pieds dans la boue, la vie