Page:Goncourt - Journal, t5, 1891.djvu/352

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Sayounsi dit, que trois choses avaient étonné et charmé son goût japonais : les fraises, les cerises, les asperges.

Il disait aussi maintenant, rêver tout haut, tantôt en français, tantôt en japonais. Comme on le questionnait, et qu’on lui demandait, dans quelle langue, se formulaient ses idées, il nous avouait que les choses de droit, les choses artificielles venaient à lui, sous des formules françaises ; les choses naturelles, les choses d’amour et autres, sous des formules japonaises.

Samedi 5 mai. — Hier au dîner, donné à l’occasion du départ de Tourguéneff pour la Russie, on cause amour, de l’amour qui est dans les livres.

Je dis que l’amour, jusqu’à présent, n’a pas été étudié dans le roman, d’une manière scientifique, et que nous n’en avons présenté que la part poétique. Zola, qui a amené la conversation sur ce sujet, un peu à propos de son nouveau livre, déclare que l’amour n’est pas un sentiment particulier, qu’il ne prend pas les êtres aussi absolument qu’on le peint, que les phénomènes qu’on y rencontre, se retrouvent dans l’amitié, dans le patriotisme, et que l’intensité grande de ce sentiment n’est amenée que par la perspective de la copulation.

Tourguéneff soutient, lui, que ça n’est pas… Il prétend que l’amour est un sentiment qui a une couleur