Page:Goncourt - Journal, t7, 1894.djvu/273

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faire le départ du troisième volume de mon Journal, apparaît dans l’entre-bâillement de la porte du cabinet de Fasquelle, la tête de Zola, et cette tête amaigrie, et si joliment amenuisée, que j’ai vue il y a un mois, sous les embêtements de Germinal, et l’exaspération de la non-réussite, a le décharnement d’une profonde maladie intérieure.

La parole du romancier est colère, strangulée. Il dit de sa pièce : « Oh ! ça disparaîtra avant huit jours… ils font 2 800… dans deux ou trois jours, ils feront font 2 800… et il y a 3 000 francs de frais… Quand j’ai vu le succès fait par la presse, aux Surprises du Divorce, je me suis bien rendu compte de ce qui m’attendait… Oui, ils veulent des choses gaies !… Ma femme ? ma femme, elle est au lit, elle a une bronchite… Pardon, je vous laisse, j’ai un tas de courses… j’ai hâte d’être à Médan… Et dire qu’avec cette pièce, ils m’ont empêché de travailler à mon roman… et que j’en ai jusqu’au mois d’août. »

Vendredi 27 avril. — Au Théâtre-Libre, Le Pain du Péché d’Aubanel, mis en vers par Paul Arène.

Dans un entr’acte, Daudet me raconte qu’Aubanel lui avait lu la pièce à lui et à Mistral, à Arles, dans le vieux cimetière des Aliscamps : Mistral et lui couchés dans une tombe antique, et Aubanel faisant sa lecture dans une autre tombe. Ceci se passait en 1861.