Page:Goncourt - Journal, t8, 1895.djvu/76

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

couleur de Rome, et parmi les grandes lignes planes de l’horizon, le sursaut de l’échancrure pittoresque dans le ciel, de la colline de Montmartre, prenant au crépuscule, l’aspect d’une grande ruine qu’on aurait illuminée.

Un dîner un peu rêveur… puis l’impression toute particulière de la descente à pied, et qui a quelque chose d’une tête qu’on piquerait dans l’infini, l’impression de la descente sur ces échelons à jour dans la nuit, avec des semblants de plongeons, çà et là, dans l’espace illimité, et où il vous semble qu’on est une fourmi, descendant le long des cordages d’un vaisseau de ligne, dont les cordages seraient de fer.

Et nous voilà dans la rue du Caire, où le soir, converge toute la curiosité libertine de Paris, dans cette rue aux âniers obscènes, aux grands Africains en leurs attitudes lascives, à cette population en chaleur ayant quelque chose de chats pissant sur la braise, — la rue du Caire, une rue qu’on pourrait appeler la rue du rut.

Alors la danse du ventre, une danse qui serait pour moi intéressante, dansée par une femme nue, et me rendrait compte du déménagement des organes féminins, du changement de quartier des choses de son ventre. Ici une remarque, que me suggèrent mes coucheries avec les femmes moresques en Afrique. C’est peu explicable cette danse, avec ce déchaînement furibond du ventre et du reste chez des femmes, qui dans le coït, ont le remuement le moins pro-