Page:Goncourt - Journal, t9, 1896.djvu/286

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théâtre italien tâte le pouls ; — les deux bandes du Spectacle des Tuileries, ces deux eaux-fortes où Gabriel de Saint-Aubin montre toute sa science du dessin, dans la représentation microscopique des promeneurs et des promeneuses de la grande allée, en 1762 ; — le Sunset in tipperary (le Coucher du Soleil en Irlande), l’estampe que je regarde comme une des plus remarquables eaux-fortes modernes, et où Seymour Haden, qui retrouva le noir velouté de Rembrandt, a pour ainsi dire, imprimé, sur une feuille de papier, la mélancolie du crépuscule.

Sur la paroi de droite, sont trois eaux-fortes de mon frère : le portrait de Raynal, d’après le La Tour de la collection Eudoxe Marcille, une de ces eaux-fortes que mon frère griffait en deux heures, et qui, un moment, lui avaient donné l’idée de graver toutes les préparations de Saint-Quentin ; — la Lecture de Fragonard, d’après le bistre du Musée du Louvre ; — une tête d’homme de Gavarni, d’après un croquis, dessiné avec un cure-dent, où le trait avachi du dessin est rendu par des pâtés d’un noir sans éclatements.

Dans la grande pièce, sur les deux battants de la porte d’entrée, deux vues de la nuit éclairée par la lune : l’un de ces kakémonos, signé Yôsaï, n’est qu’un reflet de l’astre dans une eau obscurée, au-dessus de laquelle pendent quelques brindilles lancéolées ; l’autre, signé Buntchô, représente, sur un ciel éteint, une pleine lune, sur laquelle montent des tiges de graminées aux fleurs bleuâtres et rougeâtres,