Page:Goncourt - Les Frères Zemganno, 1879.djvu/112

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Il n’y avait rien de vrai et de croyable que ce qu’il disait ; et l’on voyait le petit, quand le grand parlait, l’écouter avec ces deux bosses au-dessus des sourcils des jeunes fronts attentifs et réfléchisseurs. « Gianni l’a dit : » c’était son refrain, et, cela affirmé, il croyait que la parole de son aîné devait être une parole d’Évangile pour tout le monde comme pour lui-même. Car pour Nello sa foi en Gianni était absolue. Une fois qu’il avait été battu par un petit saltimbanque d’une baraque rivale, plus grand et plus fort que lui, sur ces mots de son frère : « Demain, tu prendras, vois-tu, cette balle de plomb que tu mettras dans ta main, tu marcheras droit à lui, tu lui porteras, comme cela, un coup de poing au milieu de la figure, et il tombera ; » le lendemain Nello mettait la balle dans le creux de sa main, donnait le coup de poing, jetait à terre son persécuteur. Ce coup de poing, il l’eût donné à Rabastens aussi bien qu’au méchant gamin, si son frère lui avait désigné