Page:Goncourt - Les Frères Zemganno, 1879.djvu/15

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plus fort que les enfants que l’on a l’habitude de voir allaiter. Elle écartait son châle et donnait le sein à son fils, tout en marchant sur ses jambes roses, à petits pas lents, vers la rivière, accompagnée d’une autre femme, qui de temps en temps embrassait la chair nue de l’enfantelet, et de temps en temps se penchait à terre pour cueillir une dent de chien qui fait de la très excellente salade.

De la seconde voiture étaient sortis des gens et des bêtes. D’abord un caniche larmoyant et pelé qui, de bonheur d’être à terre, livrait un moment une furieuse chasse à sa queue. Puis des volailles se perchant aussitôt avec des battements d’ailes heureux sur la voiture. Ensuite c’était un adolescent dont la vareuse boutonnait sur un torse sans chemise, et qui se perdait à travers le paysage, allant à l’aventure. Après lui, venait un colosse au cou de la même grosseur que sa tête, et qui avait au lieu et place de front une broussaille laineuse. Et encore un pauvre diable vêtu de