Page:Goncourt - Les Frères Zemganno, 1879.djvu/374

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plus guère que comme de pâles taches, leurs deux visages, les mains croisées du plus jeune sur la couverture, et dans un coin l’argent de son costume de clown accroché à une patère.

Gianni se leva pour allumer une bougie.

« Laisse-nous encore là dedans, » fit Nello.

Gianni vint se rasseoir près de son frère et se remit à lui parler de nouveau, voulant enfin obtenir de Nello une parole qui espérât dans l’avenir, dans un avenir même lointain.

« Non, — c’était Nello qui interrompait son frère tout à coup, — je sens que je ne pourrai plus jamais travailler… plus jamais entends-tu, plus jamais… » Et le désespéré « plus jamais » répété par le jeune frère, montait à chaque fois sur une note plus irritée, dans une espèce de crise de sourde colère. Puis finissant par frapper ses cuisses avec la douloureuse amertume de l’artiste qui a la conscience de son talent tué en lui de son vivant : « Je te le dis, s’écriait le malheureux jeune