Page:Goncourt - Madame Gervaisais, 1869.djvu/141

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les chevaux marins, les jaillissements des fontaines. On la retrouvait au Portique d’Octavie, en plein Ghetto, entre ces murs de « lombards » du moyen-âge, barrés de loquets énormes, percés de judas grillés, boutiques inquiètes de juiverie, au fumier de chiffons, picoré par des poules sautant sur des chaises dépaillées. Elle s’arrêtait devant le palazzo Farnèse, devant le temple d’Antonin le Pieux, devant ses colonnes prisonnières dans la douane, devant la masse enfumée, trouée au bas de cavernes de forges, qui fut le Théâtre de Marcellus. Elle allait partout, accueillie par une sorte d’étonnement des gens de Rome qui commençaient à reconnaître cette mère, toujours avec son enfant, à son costume, au noir éternel de sa robe à cette toilette de velours et de fourrure que Mme Gervaisais portait avec son habitude de malade frileuse ; et la forestiera, la grande dame qu’elle leur semblait être, marchant sur le pavé, paraissait une personne étrange aux préjugés romains, presque orientaux qui attachent une sorte d’originalité