Page:Goncourt - Madame Gervaisais, 1869.djvu/164

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et le lendemain, après le déjeuner, montrant à son fils un alphabet tout neuf, ouvert sur ses genoux, elle l’appela près d’elle. Il y avait sur sa figure une volonté si arrêtée, que l’enfant fut pris aussitôt du petit tremblement de tout le corps qui lui prenait lorsqu’il voyait cette figure-là à sa mère. Soumis, il s’approcha et s’appliqua docilement à répéter, après elle, chaque lettre qu’elle lui indiquait en mettant dessus une de ces allumettes de papier rose tournées par la distraction de ses doigts, le soir après dîner. Il les répétait, mais avec un effort, une contention, une contraction de gosier, un travail d’arrachement, une crispation qui faisait peine à voir, et lui mettait autour des yeux la pâleur des émotions de douleur chez l’enfant.

Mme Gervaisais s’était promis de ne pas faiblir ; souffrant elle-même de tout ce qu’elle lui faisait souffrir, elle le tint là pendant toute l’heure qu’elle s’était prescrite.

L’enfant avait à peu près prononcé les lettres que lui avait épelées et pour ainsi dire mâchées sa mère ; mais le jour où il