Page:Goncourt - Madame Gervaisais, 1869.djvu/211

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Secrètement, une métamorphose s’accomplissait au dedans de Mme Gervaisais. L’orgueil de son intelligence, son esprit d’analyse, de recherche, de critique, sa personnalité de jugement, l’énergie, rare chez son sexe, des idées propres, semblaient peu à peu décliner en elle sous une révolution de son tempérament moral, une sorte de retournement de sa nature. L’amollissement des premières approches d’une foi la livrait à la séduction de ces sensations spirituelles, dont l’action est si agissante sur l’organisme d’une femme à l’âge où elle redescend sa vie. Et le passé de son éducation, l’acquis de ses forts et vastes travaux, le souvenir armé et rebelle de ses anciennes lectures, ne la défendaient plus contre cette adoration non réfléchie née et développée en elle par la prise de tous les sens d’une âme.