Page:Goncourt - Madame Gervaisais, 1869.djvu/269

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Chassée du grand salon par la chaleur, Mme Gervaisais était allée respirer à une fenêtre de la salle à manger où se préparait le thé, et presque seule dans la pièce, elle regardait de là le jardin de la villa, la grande masse immobile, la grande ombre qui n’était pourtant pas noire, le bois bordé et ligné par le sable des allées et où des termes blanchissaient çà et là, les arbres enveloppés de l’atmosphère lactée, de ce beau sommeil nocturne qui garde son dessin à la nature en le baignant seulement d’une douceur, d’un bleu de ténèbres déchirées par le vol de feu des lucioles.

Tout dormait, et tout vivait ; et c’était un recueillement de repos, un infini de paix, d’où montait une molle poésie pénétrante et presque sensuelle, quand tout d’un coup, du creux de l’ombre, jaillit et s’éleva, comme de la fête de l’heure et du cœur du bois, une voix, un chant d’oiseau, la musique d’un rossignol amoureux jetant la note passionnée qu’il ne jette que dans la félicité limpide de ces nuits d’été de Rome !