Page:Goncourt - Madame Gervaisais, 1869.djvu/286

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

rience du prêtre ajoutée à une cruauté native. Ce bourreau de lui-même, qui avait eu à lutter avec les passions, le sang de son pays, et qui avait tué sous lui, par une véritable torture, ses appétits violents, était naturellement devenu un bourreau moral pour les autres, pour cette femme.

Et pourtant c’était par là qu’il attachait à lui sa pénitente. À se voir ainsi traitée, ainsi brutalisée, à entendre cette voix qui ne lui disait jamais rien de doux ni de consolant, à se tenir sous cet œil où il y avait de l’aigle et du loup, à s’approcher de cette oreille jaune de bile contre laquelle s’implantait le crin d’une dure barbe, à subir dans ce confessionnal les querelles, les scènes, les dédains, les emportements, Mme Gervaisais éprouvait comme un redoublement d’obéissance passive et de soumission. La sévérité, l’épouvante du représentant inexorable de Dieu, semblaient la pousser à un élancement ressemblant presque à une adoration tremblante et battue. Et il y avait encore dans la barbarie