Page:Goncourt - Madame Gervaisais, 1869.djvu/44

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

ce qui, dans cette ville-musée, arrête le pas et le regard avec un souvenir, une sculpture, un décor, une borne qui est quelquefois le pied de marbre d’un grand Dieu faisant rêver sa statue ! Au sortir de Paris, du moellon moderne, de la pierre neuve, de la cité sans art, la Parisienne goûtait un plaisir d’artiste à errer par cette cité d’histoire, pavée, bâtie, reconstruite avec les chefs-d’œuvre et les fragments précieux des siècles.

Elle s’intéressait à ce pittoresque des murs, des cours, des palais, des masures, des pans du passé, où s’ouvrait parfois, comme la bouche sauvage et fraîche d’un antre, un trou noir de fruiterie, enguirlandée de verdures, d’herbes et de chevelures de fenouil. Partout, elle trouvait des tableaux qui lui faisaient regretter cet abandon de la peinture, ce sacrifice d’un des goûts les plus chers de sa vie que les médecins avaient exigé et obtenu d’elle. Et presque toujours elle revenait par la rue des Condotti, la rue de la curiosité. Elle faisait des stations aux boutiques de mosaïques, de bijouterie, aux