Page:Goncourt - Préfaces et Manifestes littéraires, 1888.djvu/152

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aisie de faire le tour des théâtres de Paris, il se pourrait bien que les directeurs épargnassent aux censeurs le crime que je leur impute par avance et que notre pièce fût refusée partout. Le temps n’est guère aux tentatives d’art pur, et le public républicain d’aujourd’hui me paraît ressembler bien fort au public impérial d’hier, au public contemporain de cette anecdote.

Je me trouvais, il y a quelques années, dans le salon d’un grand écrivain ; autour de lui des auteurs de livres connus, des esprits distingués et bêtement idéaux, gémissaient, sur un mode élevé, du remplacement au théâtre des mots spirituels par des gorges, du remplacement des phrases bien faites par des cuisses, et à défaut de chair toute crue, et toute nue, du remplacement d’à peu près tout par des robes de Worth. Tout à coup, une actrice, connue par le cynisme de son esprit, interrompit