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L’AMOUR MATERNEL

pour venger mon fils Djiganjir, parce que la mort a éteint le soleil de mon cœur ! On m’a combattu pour conquérir des villes et des royaumes ; mais jamais personne ne m’a livré de combats pour la vie d’un homme. L’homme fut sans valeur à mes yeux ; je ne savais pas ce qu’il était ni pourquoi il se trouvait sur ma route. C’est moi, Timour, qui ai dit à Bajazet, après l’avoir vaincu : « Ô Bajazet ! les royaumes et les hommes ne sont rien aux yeux de Dieu. Vois : il les met au pouvoir de gens comme toi qui es difforme, ou comme moi qui suis boiteux ! » C’est ainsi que je lui ai parlé quand on me l’amena chargé de chaînes si lourdes qu’il chancelait sous leur poids, c’est ainsi que je lui ai parlé en le regardant dans son malheur et j’ai senti que la vie était amère comme l’absinthe, la plante des ruines.

Moi, Timour, serviteur de Dieu, je dis ce qu’il faut dire ! Voici : devant moi se trouve une femme comme il y en a des multitudes, et elle a éveillé en mon âme