Page:Gorki - Ma Vie d’enfant.djvu/160

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Et aujourd’hui encore, le moine tout bas, murmure les paroles rédemptrices.

Il demande à Dieu d’assister les hommes ; à la Vierge, de leur accorder le bonheur.

Ivan le guerrier est debout près de lui. Depuis longtemps son épée est tombée

En poussière et son armure de fer est rongée par la rouille.

Ses beaux habits sont en loques et en pourriture.

Hiver comme été Ivan reste nu. Et le gel le mord et la chaleur le brûle, et il demeure quand même.

Son sang décomposé court encore dans ses veines.

Et les loups et les ours le regardent à peine.

Il n’a pas la force de quitter cet endroit, ni de lever le bras, ni de dire un mot !

Car c’est là son châtiment : il n’aurait pas dû exécuter l’ordre abominable,

Ni se dissimuler derrière la conscience d’autrui. Mais la prière que le moine

Adresse à Dieu pour les pauvres pécheurs que nous sommes, coule toujours sereine

Comme une rivière resplendissante qui s’épanche vers l’Océan ! » . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

Dès le commencement du récit, j’avais remarqué que Bonne-Affaire s’agitait. Pour quel motif, je l’ignorais, mais il remuait les bras d’une façon bizarre, comme convulsive ; il enlevait ses lunettes, les remettait, puis les secouait selon le rythme des paroles chantantes ; il hochait la tête, touchait ses yeux, les pressait du doigt avec force et, d’un rapide mouvement de la main, s’essuyait le front et les