Page:Gourmont - Le IIme Livre des masques, 1898.djvu/199

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

grosse de l’œuvre des entrailles, et les mâles
qu’elle a portés ont trouvé doux et nourrissant
le lait de ses mamelles autant que le sang
de son ventre aux veines larges et animales…


Il y a plusieurs jolies chansons intercalées à propos dans ce poème champêtre ; en voici une pour montrer que M. René Ghil n’est pas toujours le sourd marteleur dont les vers ont des gémissements rauques :


En m’en venant au tard de nuit
se sont éteintes les ételles :
ah ! que les roses ne sont-elles
tard au rosier de mon ennui
et mon amante, que n’est-elle
morte en m’aimant dans un minuit.

Pour m’entendre pleurer tout haut
à la plus haute nuit de terre
le rossignol ne veut se taire :
et lui, que n’est-il moi plutôt
et son Amante ne ment-elle
et qu’il en meure dans l’ormeau.

En m’en venant au tard de nuit
se sont éteintes les ételles :
vous lui direz, ma tendre mère,
que l’oiseau aime à tout printemps…
mais vous mettrez le tout en terre,
mon seul amour et mes vingt ans.