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LIVRE SECOND.

Son vol agile en fin cala l’vne & l’autre aifle,
Sur les Tours dont Calcis orne fa Citadelle.
Dés qu’il eut repris terre & ſalué ces lieux
Il fit baſtir vn Temple au Dieu qui luit aux Cieux :
Et dans ce Temple exquis de grandeur & d’ouurage,
Son plumage rameur il offrit pour hommage.
Sur les portes d’airain ce rare Ouurier graua,
Le trépas d’Androgé que tant de fang laua.
Le Peuple de Cecrops pour la mort de ce Prince,
Vid par vn dur arreft condamner faProuince,
Deliurer tous les ans ſept de ſes fils à mort :
L’Vrne eſt grauée auſſi d’oùfe tiroit le fort.
Crete efleuée en Mer vis à vis eſt plantée,
Là d’vn cruel amour, Pafiphaé tentée,
D’vn taureau dédaigneux faict vn nouuel amants
Et s’expoſe au larcin de ſon embraſſement.
Le Minotaure icy leur race à double forme
Homme enſemble & taureau monſtre vn aſpect enorme.
Témoin inceſtueux d’vn execrable lic.
L’admirable Maifon ceſte hiſtoire embellit,
L’impenetrable erreur du ſcabreux Labyrinthe,
Se void à longs detours par le burin dépeincte.
Mais l’artiſan luy-mefme attendry de pitié
De l’Infante bruflant d’vne ieune amitié ;
Demella dextrement les nœuds & les ambages,.
Dont il auoit tramé l’intrigue des paſſages :
Guydant par vn long fill’aueuglement des pas
De l’amant eſtrangeraffranchy du trepas..
Toy mefme, pauure Icare, en firiche peinture.
Euffes veu le portrait de ta triſte aduanture :
Car Dedale trois fois de ton amour ardent
Voulut au front de l’or tracer ton accident :
Mais fa main par trois fois d’aſpre douleur ſurpriſe,
Luy tomba fur le ſein & trahicl’entrepriſe.
L’œil du Heros Troyen ces merueilles fuyuoit,.
Etfon fidelle Acate aux portes artiuoit ;