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LIVRE SECOND.

1.
LIVRE SE COND.
Pour voler à Pluton fon efpoufe loyale :
Cét autre ofa rauir du portail des Enfers
Cerbere gardien l’empeftrant de gros fers.
La Prophete d’Amphrife en ces termes replique..

Nulle embufche, ô Caron, nulle entreprife inique,
Ne nous ameine à toy, quitté ce vain foucy :
Et pour forcer aucun l’acier ne luit icy.
Que l’effroyable chien portier des Regnes fombres,
Defes abbois fans fin tance les pafles Ombres :
Que Proferpine auffi, chafte & pure à iamais,
Defon oncle Pluton occupe le Palais.
Celuy queie conduis eft le Troyen Ænée,
Qui des plus hauts lauriers ayant fa gloire ornée,
Infigne en pieté, grand Naucher, te fèmond,
Pour aller versfon Pere en ce Monde profond.
Si telle pieté ne touche ton courage
Qu’il foit aumoins touché du refpect de ce gage.
Deiphobe à ce mot luy montreà découuert,
Le facré rameau d’or foubs fon habit ouuert.
Au venerable afpect de ce don falutaire,
Ce cœur enflé s’appaife & r’affied fa colere :
Le Nautonnier rauy pique fes yeux conftans,
Sur ce fatal rámeau qu’il n’a veu de long-temps :
Et fans plus refifter, dans vn calme filence
Sanacelle rouillée à la riue il aduance.
Lors dechaffant au loin les fantofmes des morts,
Qui fe rangeoient en foule au long des triftes bords ;
Il fait vn large efpace, & loge en la nacelle
Le grand corps du Troyen & la fage Pucelle :
Dont l’efquif de vieux ais gemit foubs le fardeau,
Et par mainte creuaffeilbaaille & puife l’eau.
Le Dieu fuit cette plage & de longue trauerfe
Ilmefure Acheron fumant d’efcume perfe :
Puis les pofe à la fin en l’autre extréme part,
Dans vn marais bourbeux d’vlue efpaiffe blaffard.
Or le grand chien portier d’vn triple gofier tonnes
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