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LES ADVIS.

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LES AD VIS.
De paffer l’eau de Stix priué de fepulture ?
Verras-tu fans congé les Courants des Enfers ?
Et leurs Ports fans adueu te feront-ils ouuerts ?
Ceffe de croire auffi que les Cieux peruertiffent,
Par prieres ny væeux les Loix qu’ils eftabliffent.
Mais reçoy cét aduis pourfoulager ton foin.
Les Peuples des Citez aduertis prés & loin,
Parle fléau menaçant des prodiges celeſtes,
D’expier ton maffacre & tes peines funeftes ;
Te feront elleuer vn riche monument,
D’vne fameufe obfeque orné pompeuſement
Et le lieu fignalé de ta trifte aduenture,
Retiendra pour iamais le nom de Palinure.
L’Efprit s’appaife lors affeuré du tombeau,
Flattant vn peu fon dueil de cét efpoir nouueau,
De voir apres la mort fa memoire illuſtrée,
Dans le nom eternel d’vne riche Contrée.
Partant la Vierge Sainete & le Fils de Venus,
Continuans leur train prés de Stix font venus.
Mais dés que le Naucher ramant aux bords de l’onde,
Les apperçoit de loin dans la foreft profonde,
Cheminer en filence & s’approcher des flots,
D’vn fon rude il les tance & profere ces mots.
O quiconque fois-tu, prophane temeraire,
Qui viens au Stix armé, dy, que penfes-tu faire ?
Et fans paffer plus outre arrefte là tes pas.
Le Ciel affigne icy le feiour du Trefpas :
Icy la Nuit muette & le Somme refident :
Les immuables loix qui fur ce Lac prefident,
Deffendent qu’vn Viuant au traiect foit reçeu.
Et me trouuay iadis mefcontent & deceu,
D’auoir offert ma barque & ma peine preftée,
A paffer le Thebain, Thefee & Perithée,
Quoy que nez des grands Dieux & d’illuftre valeur,
Ces deux là par l’inftin&t d’vne folle chaleur,
Tenterent vn effort fur la couche royale,
Pour