Page:Graetz - Histoire des Juifs, A. Lévy, tome 2.djvu/180

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permis; mais, par suite de leurs idées rigoristes, ils se heurtaient à maintes difficultés.

Ainsi se développèrent les traits caractéristiques de l’essénisme, qui excitèrent tant d’étonnement : la communauté des repas et le célibat. La vie en commun amena les Esséniens à renoncer à tous leurs biens. Car que servait à un membre de l’ordre d’avoir un patrimoine ? Chacun abandonna donc sa fortune à la caisse de l’ordre, laquelle subvenait aux besoins des affiliés. De là cette maxime : Le Hassid dit : Le mien et le tien t’appartiennent. Il n’y eut donc parmi eux ni riches ni pauvres. Indifférents à tout intérêt matériel, les Esséniens, dont la pensée était uniquement tournée vers la religion, se détachèrent de plus en plus de toute préoccupation terrestre pour s’abandonner au rêve et à l’extase. Les Esséniens se signalaient encore par d’autres particularités. Comme les Israélites pendant leur marche à travers le désert, chaque affilié portait sur soi une pelle pour creuser la terre, avant de satisfaire ses besoins naturels ; l’acte accompli, il en faisait disparaître les traces en les recouvrant de terre. Les Esséniens portaient aussi une espèce de tablier de cuir ou de serviette, qui leur servait à s’essuyer les mains après les ablutions. Chaque matin ils prenaient un bain froid, comme les prêtres avant le service du temple, afin de se purifier des souillures même inconscientes. De leur coutume de prendre ainsi un bain tous les matins, on les appela baigneurs du matin. Il semble même que leur nom d’Esséniens vient de là, ce mot signifiant en chaldéen baptistes au bain (As’chaï, prononcez Assaï).

Cependant ces pratiques extérieures n’étaient pour eux que le premier degré de la piété intérieure et de l’union intime avec Dieu qui, d’après les idées des anciens, ne peuvent être réalisées qu’en fuyant le monde, qu’en vivant dans le silence de la solitude et dans l’ascétisme. La simplicité dans la nourriture et le vêtement, la sobriété, la chasteté, l’esprit de dévouement toujours en éveil, étaient des vertus chères aux Esséniens ; mais elles ne leur étaient pas particulières et les Pharisiens les professaient également. Ce qui distinguait les Esséniens, c’était l’horreur qu’ils éprouvaient à prêter serment, leurs prières fréquentes et la méditation d’une espèce de doctrine secrète. Avant la prière, ils