Page:Graetz - Histoire des Juifs, A. Lévy, tome 2.djvu/356

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barrer le passage, et démolirent les galeries qui reliaient la forteresse au temple (17 iyar). Dès lors, le procurateur dut renoncer à l’espoir de devenir un autre Crassus. Sans y songer, les habitants de Jérusalem venaient de faire la première étape de l’insurrection.

Voyant l’attitude résolue du peuple, Florus perdit courage. Il déclara aux chefs de la ville que, dans l’intérêt de la tranquillité, il allait se retirer avec ses troupes, et ne laisserait à Jérusalem qu’une petite garnison. Ceux-ci lui ayant fait observer que les soldats étaient généralement haïs du peuple à cause de leurs procédés barbares, Florus leur permit de désigner eux-mêmes la cohorte qui avait pris la part la moins considérable au massacre. Les chefs de la ville désignèrent la cohorte commandée par Métilius, dont le caractère faible et irrésolu leur paraissait une garantie contre le retour des troubles. Aussitôt que Florus fut parti, l’agitation fiévreuse qui régnait dans la ville fit place à de froides et énergiques résolutions. La population se divisa en deux partis, le parti de la révolution et celui de la paix. Le premier se composait surtout de jeunes gens qui suivaient les principes des zélateurs, qui voulaient, au péril de leur vie, en finir, avec la tyrannie romaine et reconquérir la liberté perdue. Ce parti, d’ailleurs, ne manquait pas d’intelligence politique : il avait noué des relations avec la famille royale d’Adiabène, si dévouée au judaïsme, et avait su mettre dans ses intérêts les communautés partho-babyloniennes. Les membres de ce parti s’engagèrent, par un serment solennel, à mourir plutôt que de se rendre aux Romains ; et ce serment, ils le gardèrent au milieu des mêlées furieuses, sous la grêle des flèches, dans les tortures même et devant les fauves du cirque. L’âme de ce parti de la révolution était Éléazar ben Hanania, d’une famille de grands prêtres. Éléazar était très versé dans la science de la Loi ; il appartenait à la rigide école de Schammaï, sympathique en majeure partie aux zélateurs. — Au parti de la paix appartenaient les sages, les Hillélites, ennemis de la guerre par principe ; les notables, qui tenaient leur pouvoir de Rome ; les riches, qui craignaient pour leurs biens. Tout en exécrant Florus, ils désiraient le maintien du statu quo sous le sceptre de Rome. Dans leur naïveté, ils ne comprenaient pas que le mal dont souffrait