Page:Graetz - Histoire des Juifs, A. Lévy, tome 2.djvu/366

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chrétiens s’étaient déjà si bien désintéressés de la cause nationale qu’ils abandonnèrent Jérusalem pour émigrer à Pella, ville païenne au delà du Jourdain.

Dans la capitale régnait un mouvement extraordinaire, qui lui donnait un aspect tout nouveau. Partout on forgeait des armes et on fabriquait des machines de guerre afin d’être prêt en cas de nouvelles attaques. Les murailles étaient fortifiées et crises en état de défense, de façon à soutenir un long siège. La jeunesse s’exerçait continuellement au maniement des armes. L’enthousiasme suppléait à l’expérience militaire. Dans la Judée entière, les patriotes relevaient la tète et formaient des comités provisoires pour organiser les préparatifs d’une lutte formidable. Des Judéens de l’étranger s’associaient à ces efforts avec une ardeur passionnée.

On ne peut douter que le Grand Sanhédrin n’ait recouvré à cette époque son autorité absolue et, par suite, la haute direction des affaires politiques et militaires. Il avait à sa tête Siméon ben Gamaliel, un descendant de Hillel, qui, au dire de son adversaire même, était un homme de sens et d’énergie et qui, si on l’eût toujours écouté, aurait assuré à l’insurrection les meilleurs résultats. Sans être du parti des zélateurs à outrance, il voulait cependant qu’on menât énergiquement la campagne, et il appuyait de toute son autorité ceux qui voulaient faire de la révolution une vérité. Sur des monnaies de la première et de la deuxième année de l’indépendance judaïque se lit l’inscription : SIMÉON, NASSI (prince ou président) D’ISRAËL. La défaite de Cestius ne fit qu’accroître la haine des gentils contre leurs voisins de Judée. Soit pour prévenir leurs attaques, soit pour venger l’échec infligé aux Romains, ils se réunirent en masse et immolèrent sans pitié les Judéens domiciliés parmi eux, hommes, femmes et enfants. Ces boucheries soulevaient d’autant plus d’horreur chez les patriotes que la plupart des communautés ainsi frappées étaient innocentes et n’avaient pas pris la moindre part à la révolte. Naturellement, les Judéens vengèrent, comme ils purent, ces atrocités sur les gentils de leur voisinage, qui à leur tour usèrent de représailles. Ainsi s’accrut la haine de race entre les Judéens d’une part, les Romains et les Grecs d’autre part, et cette animosité s’étendit fort au delà des