Page:Graetz - Histoire des Juifs, A. Lévy, tome 4.djvu/350

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ne cessait de leur infliger ; elle les augmenta, au contraire. Les sauvages hussites ne manifestèrent pourtant aucune haine pour les Juifs. Il leur arriva une seule fois, quand ils pillèrent des maisons catholiques, de piller en même temps des maisons juives, et ils se montrèrent sévères pour quelques usuriers juifs. Mais ce fut de la part des catholiques que les Juifs eurent à subir de nouvelles violences. Accusés d’avoir fourni des armes et de l’argent aux hussites et de se montrer favorables à leurs hérésies, les Juifs des villes bavaroises voisines des forêts de la Bohème furent cruellement maltraités. Dans leurs prédications contre les hussites, les dominicains excitaient en même temps les peuples et les princes contre les Juifs, et, comme à l’époque des croisades et de la lutte contre les Albigeois, ce furent les Juifs qu’on massacra les premiers.

Les désordres commencèrent en Autriche. Dans sa conduite à l’égard des Juifs, ce pays a un trait de ressemblance avec l’Espagne, avec laquelle il avait, du reste, assez d’affinité politique pour s’allier arec elle plus tard. Comme l’Espagne, l’Autriche traita d’abord la population juive avec une généreuse tolérance, pour lui faire endurer ensuite les plus sanglantes persécutions. On poussa littéralement à bout l’honnête et digne archiduc Albert pour qu’il se déclarât contre les ennemis de Dieu. On répandit contre les Juifs toute sorte de calomnies, qui n’avaient même pas le mérite de la nouveauté, mais avaient toujours produit leur effet et étaient bien faites pour impressionner un prince juste, incapable de soupçonner chez des ecclésiastiques le mensonge et la duplicité. Un accident arriva à trois enfants chrétiens de Vienne qui, en patinant, tombèrent dans l’eau et se noyèrent. Quand les parents, qui ignoraient cet accident, firent part de la disparition de leurs enfants, on raconta immédiatement que les Juifs les avaient assassinés pour se servir de leur sang pendant Pâque. À cette première accusation vint s’en joindre bientôt une autre. Le bruit se répandit que la femme du sacristain d’Enns avait dérobé une hostie pour la vendre à un riche Juif du nom d’Israël, qui l’aurait fait présenter, pour la profaner, aux communautés juives de l’Autriche et d’autres pays. Au XVe siècle, ces accusations de meurtre d’enfants chrétiens et de profanation d’hostie étaient encore acceptées en toute confiance.