Page:Graetz - Histoire des Juifs, A. Lévy, tome 4.djvu/374

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que les Juifs de Breslau avaient brûlé une fois une hostie, et qu’une autre fois ils avaient volé un garçon chrétien, l’avaient engraissé, enfermé et roulé dans un tonneau rempli de pointes acérées, jusqu’à ce qu’il eût rendu l’âme. Les meurtriers avaient alors pris de son sang pour en envoyer aux autres Juifs de la Silésie. Les autorités, encore qu’ils n’eussent fait aucune enquête, crurent à la réalité de ce crime. Trois cent dix-huit Juifs furent arrêtés dans diverses communautés de la Silésie, conduits à Breslau et jugés par Capistrano. De ces inculpés, quarante et un furent brûlés (2 juin 1453) sur le Salzring, aujourd’hui le Blücherplatz, où demeurait Capistrano. Le rabbin de la communauté conseilla à ses codétenus de se tuer ; lui-même se pendit. Toute la population juive fut expulsée de Breslau ; les enfants âgés de moins de sept ans avaient été arrachés à leurs parents, baptisés et confiés à des chrétiens pour être élevés dans la religion chrétienne.

Toutes ces violences avaient été ordonnées par Capistrano, qui prouva, dans un mémoire savant, au roi Ladislas qu’elles étaient conformes à l’esprit du christianisme. Telle ne paraissait pas être l’opinion de l’honnête greffier municipal Eschenlœr, qui, trop timoré pour se prononcer publiquement sur ces cruautés, consigne cette remarque dans son journal : De pareils excès sont-ils vraiment prescrits par Dieu ? Je dois m’en rapporter au jugement des docteurs de l’Église. Mais à ce moment, ces docteurs s’étaient changés en bourreaux. Les biens des Juifs brûlés et chassés turent consacrés à l’érection de l’église des Bernardins. Dans les autres villes de la Silésie, les Juifs subirent le munie sort qu’à Breslau ; les uns furent livrés aux flammes, les autres pillés et chassies.

Sollicité par le conseil de la bourgeoisie de Breslau d’interdire, à l’avenir, l’établissement des Juifs dans jette ville, le jeune roi Ladislas ne se contenta pas de ratifier cette demande, à la gloire de Dieu et de la foi chrétienne, mais, en digne fils du cruel Albert II, qui avait chassé les Juifs d’Autriche, il approuva le supplice infligé aux Juifs de Silésie par ces paroles iniques qu’ils avaient été traités selon leur mérite. À l’instigation, sans doute, de Capistrano, qui séjourna quelque temps à Olmutz, Ladislas expulsa les Juifs de cette ville ainsi que de Brünn.