Page:Graetz - Histoire des Juifs, A. Lévy, tome 4.djvu/66

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plus tard. Affirmation audacieuse pour l’époque, et qui n’a été reprise que dans les temps récents.

Samuel ibn Nagrela, l’orgueil du judaïsme espagnol, qui, selon l’expression de son biographe, était ceint de la quadruple couronne de la science, de la naissance, de la gloire et de la bonté, mourut en 1055, sincèrement regretté et pleuré de ses contemporains. Il fut enterré près de la porte d’Elvire, à Grenade, et son Cils lui érigea un magnifique mausolée. Ibn Gabirol composa en son honneur ce quatrain :

Tu résides dans mon cœur,

Ton nom y est gravé à jamais.

Là, je te cherche et là je te trouve,

Je suis attaché à ton souvenir comme à mon âme.

Abou Housseïn Joseph ibn Nagrela (né en 1031) succéda à son père dans toutes ses dignités. Il fut nommé vizir par le roi Badis,. et quoiqu’il eût alors à peine vingt ans, la communauté juive lui conféra le titre de rabbin et de chef (naguid). Instruit par des savants juifs que son père avait fait venir de divers pays, versé dans la littérature arabe, Joseph montra de bonne heure une grande maturité d’esprit. Quand il se maria à dix-huit ans, il ne choisit pas sa femme parmi les riches et les notables d’Andalousie, il alla la chercher dans une famille pauvre mais vertueuse et universellement respectée, celle de Nissim, de Kairouan. Possesseur d’une grande fortune, occupant une brillante position, jeune et beau, Joseph menait cependant une existence simple, qui formait un contraste frappant avec la vie somptueuse de la noblesse. Il dirigeait avec dévouement et indépendance les affaires de l’État et, comme son père, il protégeait les poètes et les écrivains juifs, était à la tête d’une école et enseignait le Talmud. Sa générosité s’exerçait également envers les poètes arabes, qui célébraient ses louanges. Quand les deux fils du dernier gaon de Babylonie, qui descendaient d’un exilarque, arrivèrent en Espagne, le jeune ministre leur fit un excellent accueil et les établit à Grenade.

En deux points, cependant, Joseph différait de son père : il n’avait ni sa prudence ni son affabilité. Ainsi il nommait trop