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I55 VISION

« Eh bien, les nations ont aussi leur printemps ;

J’en sens déjà dans l’air les premières haleines :

Le réveil de mon peuple est prochain ; je l’attends.


« Son expiation va finir ; dans ses veines

Déjà monte et frémit un sang plus généreux ;

Et la France bientôt fera tomber ses chaînes.


— Ah ! m’écriai-je alors, heureux, trois fois heureux

Ceux qui verront ce jour que tout grand cœur souhaite !

Qu’il couronne au plus tôt tant d’efforts douloureux !


— Je peux te le montrer, dit encor le poète.

Tu verras l’avenir comme dans un miroir ;

Que la paix rentre enfin dans ton âme inquiète !


« Regarde I » Et tout d’abord je ne pouvais rien voir

Que la nuit qui cachait la forêt tout entière

Et formait sous mes j^eux un épais rideau noir.


Mais l’Ombre de son doigt me touchant la paupière,

Le voile qui couvrait mes sens fut déchiré ;

L’avenir m’apparut comme un trait de lumière...


Et peut-être qu’au monde un jour je le dirai.




1858